jeudi 5 septembre 2013
Première séance du mercredi 04 septembre 2013
Déclaration du Gouvernement sur la situation en Syrie et débat sur cette déclaration
M. le président. La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
M. Christian Jacob. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, le 21 août, des armes chimiques ont été utilisées à Damas. Nous condamnons cet acte barbare, sauvage et inhumain de toutes nos forces.
Le 27 août, le Président de la République annonce que la France est prête à intervenir en Syrie.
Huit jours plus tard, vous conviendrez avec nous que François Hollande, votre Gouvernement et la France se retrouvent dans une impasse diplomatique et militaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Lucien Degauchy. Très bien !
M. Christian Paul. Cela commence assez mal !
M. Christian Jacob. Vous auriez dû, monsieur le Premier ministre, vous souvenir de votre discours du 22 mars 2011. La France, sous l’impulsion du Président Nicolas Sarkozy, intervenait depuis trois jours dans le ciel libyen. Vos mots, je le suppose et j’en suis convaincu, avaient été pesés : « Les objectifs, les moyens employés, l’organisation des alliés ne peut ni ne doit se faire sans mandat de l’ONU. Faute d’une telle légitimité, toute initiative se retournerait contre ses promoteurs ». (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) C’étaient vos mots, monsieur le Premier ministre. (Mêmes mouvements.)
Eh bien, justement, la France intervenait en pointe et avec ses alliés, forte d’une résolution et d’un mandat de l’ONU. Aujourd’hui, dans l’affaire syrienne, où sont nos alliés ? Où est la résolution des Nations unies ?
Plusieurs députés du groupe UMP. Il n’y en a pas !
M. Christian Jacob. Monsieur le Premier ministre, pourquoi avez-vous changé d’avis ? Cette amnésie ne serait finalement pas si grave si elle ne venait relayer la politique hasardeuse du chef de l’État, une politique qui rompt avec une doctrine constante de la France en matière de politique étrangère. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Henri Jibrayel. Vous ne pouvez pas dire ça !
M. Jean-Christophe Lagarde. Le changement, c’est tout le temps !
M. Christian Jacob. Lui qui se plaît, souvent mal à propos, à invoquer l’action du Président Chirac, pourquoi n’a-t-il pris aucune initiative bilatérale, notamment avec nos amis russes ? Pourquoi n’a-t-il pris aucune initiative européenne ne fût-ce que la réunion du Conseil européen pour éviter l’isolement total de la France au sein de l’Union ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La France peut-elle sérieusement, sans allié européen, se lancer tête baissée dans une aventure de la sorte ? Nous pensons que non.
Plusieurs députés du groupe SRC. Munich !
M. Christian Jacob. Ne vous montrez pas aussi médiocres que le premier secrétaire du parti socialiste, mes chez collègues ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Patrick Lemasle. C’est pathétique !
M. Laurent Baumel. Ce n’st vraiment pas au niveau ! Parlez du sujet !
M. le président. S’il vous plaît, écoutons avec respect les présidents des groupes. M. Bruno Le Roux s’exprimera à son tour.
M. Christian Jacob. La constance de notre politique étrangère a su rassembler les Français. Cette permanence a permis à la France d’être écoutée sur la scène internationale, d’avoir une voix qui porte et d’être aux yeux du monde un pays respecté. Jacques Chirac, en 2003, au moment où les États-Unis et le Royaume-Uni poussaient à la guerre en Irak, avait résumé en une phrase la doctrine française : « S’affranchir de la légitimité des Nations unies, privilégier la force sur le droit, ce serait prendre une lourde responsabilité ».
J’ai la tristesse de vous dire que les décisions de François Hollande mettent gravement en danger ces acquis. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Dans le monde multipolaire tel qu’il est dans cette région du monde si tourmentée, la voix de la France doit être spécifique. Fidèle à son indépendance, elle doit mettre en œuvre un principe d’action simple : toujours alliée des États-Unis, jamais alignée.
M. Claude Goasguen. Bravo !
M. Christian Jacob. Est-ce aujourd’hui le débat de ce changement fondamental de doctrine que vous souhaitez ?
Vous conviendrez qu’en une heure trente, là où les Britanniques ont débattu dix heures avant de voter, ce sera un peu court, d’autant que vous ne nous avez pas réellement éclairés.
Votre empressement à soutenir l’axe Paris-Washington est même quelque peu surréaliste lorsqu’on se souvient que vous avez refusé la prolongation de la présence de nos armées en Afghanistan nous accusant – je vous cite – « d’avoir acquitté sans mot dire les demandes de l’administration Bush ». (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. Retrouvons notre calme sur un tel sujet, s’il vous plaît !
M. Christian Jacob. En septembre 2008, nous étions tout simplement fidèles à la décision de Jacques Chirac et de Lionel Jospin.
M. Jean Glavany. Ce n’est pas vrai. Le Gouvernement avait changé !
M. Christian Jacob. En Afghanistan, l’action de la France avait la légitimité que confèrent les résolutions des Nations unies.
Grand pays membre permanent du Conseil de sécurité, la France n’a pas vocation à attendre le vote du Congrès américain les bras croisés. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Jean Glavany. Mais vous voulez avoir celui de Poutine !
M. Christian Jacob. Comprenez-nous bien, monsieur le Premier ministre : sans mandat, le Président de la République ne peut prendre une telle décision sans que le Parlement ne se prononce. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Jean Glavany. Vous ne l’avez jamais fait !
M. Christian Jacob. L’article 35 ne l’y oblige pas, mais ne le lui interdit pas. La Constitution l’autorise également à vous demander d’engager la responsabilité de votre Gouvernement. C’est la décision que François Mitterrand avait prise en 1991. Nous ne pouvons ignorer que ce débat pose une sérieuse question institutionnelle. En convoquant le Parlement avant l’intervention éventuelle de nos soldats, le Président de la République a pris un risque insensé sur le plan institutionnel.
Selon la logique institutionnelle, celle de l’article 35, c’est le Président qui décide ; il informe le Parlement, et celui-ci vote après quatre mois d’intervention. Or François Hollande a convoqué le Parlement avant d’avoir pris quelque décision que ce soit. Qu’il ne s’étonne pas aujourd’hui de se voir réclamer un vote ! (Rires exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Celle-ci, c’est la meilleure !
M. le président. Allons, mes chers collègues ! Votre orateur s’exprimera juste après.
M. Christian Jacob. Avec cette convocation à contretemps, il a pris le risque d’affaiblir la fonction présidentielle qui ne s’accommode pas d’indécision, d’atermoiement ni de suivisme. Il a également pris le risque d’affaiblir l’Assemblée elle-même car les Français ne comprennent pas que leurs députés ne donnent pas le feu vert ou rouge à cette intervention.
Voilà pourquoi vous ne pourrez échapper, d’une manière ou d’une autre, à un vote formel de l’Assemblée nationale. Le Président de la République s’est mis lui-même dans une nasse institutionnelle, encore resserrée par le vote britannique et l’annonce du vote du Congrès américain.
Par conviction, mais par filiation aussi, nous cherchons à être fidèles à l’esprit et à la lettre de notre Constitution.
Nous avons évité, à ce stade, d’oser ce que vous aviez osé. Au printemps 2008, lorsque Nicolas Sarkozy a décidé le renforcement de notre présence militaire en Afghanistan, François Hollande a défendu lui-même, à cette tribune, une motion de censure le 8 avril.
Ici même, il a dit…
M. Jean-Marie Le Guen. Faites l’inventaire !
M. Christian Jacob. …mais lui aussi l’a oublié : « dans toute démocratie digne de ce nom, de tels arbitrages auraient été précédés d’un large débat et d’un vote solennel du Parlement ». (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Vous voyez, monsieur le Premier ministre – je ne suis pas sûr que cela nous rassure – que la constance du Président de la République vaut au moins la vôtre !
Le large débat, où est-il ? En une semaine, vos ministres n’ont pas trouvé le temps d’informer les commissions compétentes – la défense et les affaires étrangères. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Vous n’avez réuni les présidents de groupe et de commission que lundi, après y avoir été contraints par les événements. Des erreurs gravissimes ! Votre responsabilité était de créer les conditions du consensus. Tout a été fait pour s’en éloigner.
Le 27 août, le Président de la République nous a annoncé que la France était prête à intervenir. Nous avons collectivement et immédiatement posé deux préalables : la publication du rapport de l’ONU sur l’utilisation des armes chimiques, la base juridique à pour intervenir, et la légitimité d’un mandat de l’ONU.
M. Jean-Christophe Cambadélis. Ce n’est pas ce qu’a dit Copé !
M. Christian Jacob. Notre grille de lecture s’appuie en particulier sur les nombreuses et troublantes similitudes avec la guerre en Irak. Comme en Irak, l’élimination d’un dictateur ne suffira pas à poser les fondations d’un régime démocratique. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Comme l’Irak, la Syrie est un pays en guerre civile. Comme l’Irak, la Syrie est un pays complexe dans sa composition ethnique avec une minorité kurde importante, complexe dans sa composition religieuse, divisé entre les sunnites et une minorité chiite et alaouite dirigeante, sans oublier la situation des chrétiens d’Orient dans cette partie du monde, qui ne peut nous laisser insensible, mes chers collègues ! (« Bravo ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Nous vous demandons aussi, monsieur le Premier ministre, de mesurer les conséquences d’une intervention sur les intérêts français au Liban et la sécurité des soldats français sous casque bleu au Liban. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)Tout en Syrie, comme en Irak il y a dix ans, converge pour que la France fasse entendre la voix de la légitimité internationale. Rien ne justifie un changement de pied aussi radical de notre diplomatie politique et militaire.
M. Jacques Myard. C’est suicidaire !
M. Nicolas Bays. Et les victimes civiles ?
M. Christian Jacob. Évidemment comme vous, nous avons ressenti une intense émotion en découvrant, lundi soir, avec vous, monsieur le Premier ministre, les images insoutenables de civils, d’enfants et d’adultes suffoquant avant de mourir. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Nicolas Bays. Cinéma ! Vous n’en avez rien à faire ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. Monsieur Bays, je vous en prie ! Chers collègues, un peu de calme !
M. Christian Jacob. L’utilisation de gaz est un tabou absolu du droit international depuis le protocole de Genève de 1925…
M. Christian Paul. Alors ?
M. Christian Jacob. …et plus encore depuis 1993, avec l’adoption de la convention sur l’interdiction et la destruction des armes chimiques.
M. Christian Paul. Mais alors ?
M. Christian Jacob. Mais c’est, vous le savez pertinemment, à l’ONU et à l’ONU seule de nous dire comment et par qui des gaz ont été utilisés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Dès la publication de ce rapport, la France devra, sans tarder, prendre des initiatives diplomatiques fortes, déposer un projet de résolution devant le Conseil de sécurité et le défendre pour entraîner l’adhésion de la communauté internationale.
C’est donc le cœur lourd, au regard d’une cause qui pourrait justifier une riposte, que nous exprimons trois refus : refus d’une action strictement militaire sans but réel de guerre au-delà d’un coup de semonce ou d’une punition (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) ; refus d’une intervention isolée sans légitimité internationale (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI) ; refus enfin d’un renoncement, voire, à certains égards, d’un reniement de notre politique étrangère.
Dans ce moment exceptionnellement grave, le Président de la République a une responsabilité historique : celle de faire vivre la voix singulière de la France dans le concert des nations.
M. Claude Goasguen. Très bien !
M. Christian Jacob. Voix singulière, forte et indépendante ; or la France est seule aujourd’hui, isolée comme elle ne l’a jamais été, spectatrice de ce qui se passera le 9 septembre à Washington.
Monsieur le Premier ministre, nous avons posé deux préalables à toute intervention de la France. Notre position est dictée par le long cours de la politique étrangère de la France. Le Président de la République n’a pas reçu mandat de s’affranchir du cadre des Nations unies. Si d’aventure il venait à prendre cette lourde responsabilité, les députés de l’UMP ne le soutiendraient pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI. – Mmes et MM. les députés du groupe UMP se lèvent et applaudissent.)
Discours de Christian Jacob (4 septembre 2013)
Monsieur le Président,
Monsieur le Premier Ministre,
Messieurs les Ministres,
Mes chers collègues,
Le 21 août, des armes chimiques ont été utilisées à Damas. Nous condamnons cet acte barbare, sauvage et inhumain de toutes nos forces.
Le 27 août, le Président de la République annonce que la France est prête à intervenir en Syrie.
8 jours plus tard, vous conviendrez avec nous que François HOLLANDE, votre Gouvernement et la France sont dans une impasse diplomatique et militaire.
Vous auriez dû, M. AYRAULT, vous souvenir de votre discours du 22 mars 2011.
La France, sous l’impulsion du Président SARKOZY, intervenait depuis 3 jours dans le ciel lybien.
Vos mots, je le suppose, avaient été pesés : « les objectifs, les moyens employés, l’organisation des alliés ne peut ni ne doit se faire sans mandat de l’O.N.U. Faute d’une telle légitimité, toute initiative se retournerait contre ses promoteurs ».
Eh bien justement, la France intervenait, en pointe et avec ses alliés, forte d’une résolution et d’un mandat de l’O.N.U. Aujourd’hui, dans l’affaire syrienne, où sont ses alliés ? Où est la résolution des Nations Unies ?
M. AYRAULT, pourquoi avez-vous changé d’avis ? Ce ne serait finalement pas si grave si cette amnésie ne venait relayer la politique hasardeuse du chef de l’Etat. Une politique qui rompt avec une doctrine constante de la France en matière de politique étrangère.
Lui qui se plaît, souvent mal à propos, à invoquer l’action du Président CHIRAC, pourquoi n’a-t-il pris aucune initiative bilatérale, notamment avec nos amis russes. Pourquoi n’a-t-il pris aucune initiative européenne, ne fut-ce que la réunion du Conseil européen pour éviter l’isolement total de la France au sein de l’Union.
La France peut-elle sérieusement, sans aucun allié européen, se lancer tête baissée dans une aventure de la sorte ? Nous ne le pensons pas.
Au-delà des majorités politiques, au-delà même des présidents de la République qui se sont succédé, la constance de notre politique étrangère a su rassembler les Français. Cette permanence a permis à la France d’être écoutée sur la scène internationale, d’avoir une voix qui porte et d’être aux yeux du monde un pays respecté.
Jacques CHIRAC, en 2003, au moment où les Etats-Unis et le Royaume-Uni poussaient à la guerre en Irak, avait résumé en une phrase la doctrine française : « s’affranchir de la légitimité des Nations-Unies, privilégier la force sur le droit, ce serait prendre une lourde responsabilité ».
J’ai la tristesse de vous dire que les décisions de François HOLLANDE mettent en danger ces acquis, en grave danger.
Dans le monde multipolaire tel qu’il est, dans cette région du monde si tourmentée, la voix de la France doit être spécifique. Fidèle à son indépendance, elle doit mettre en œuvre un principe d’action simple. Toujours alliée des Etats-Unis, jamais alignée.
Est-ce aujourd’hui le débat de ce changement fondamental de doctrine que vous souhaitez ?
Vous conviendrez qu’en 1h 30, là où les britanniques ont débattu 10 heures avant de voter, ce sera un peu court d’autant que vous ne nous avez pas réellement éclairé.
Votre empressement à soutenir l’axe Paris-Washington est même quelque peu surréaliste lorsqu’on se souvient que vous avez refusé la prolongation de la présence de nos Armées en Afghanistan nous accusant « d’avoir acquitté sans mot dire les demandes de l’administration Bush ».
En septembre 2008, nous étions tout simplement fidèles à la décision conjointe de Jacques CHIRAC et de Lionel JOSPIN.
En Afghanistan, l’action de la France avait la légitimité que confèrent les résolutions de l’O.N.U.
Grand pays, membre permanent du Conseil de Sécurité, la France n’a pas vocation à attendre le vote du Congrès américain les bras croisés.
Comprenez-nous bien Monsieur le Premier Ministre : le Président de la République ne peut prendre une telle décision, qui engagera si elle est prise, la vie de nos soldats, sans que le Parlement ne se prononce.
L’article 35 ne l’y oblige pas, mais ne lui interdit pas. La Constitution l’autorise également à vous demander d’engager la responsabilité de votre Gouvernement.
François Mitterrand avait pris cette décision en 1991.
Nous ne pouvons ignorer que ce débat pose une sérieuse question d’ordre institutionnel. En convoquant le Parlement avant l’intervention éventuelle de nos soldats, le Président de la République a pris un risque insensé sur le plan institutionnel.
La logique constitutionnelle, celle de l’article 35, c’est le Président décide, il informe le Parlement et le Parlement vote après 4 mois d’intervention.
François HOLLANDE a convoqué le Parlement avant d’avoir pris quelques décisions que ce soit. Qu’il ne s’étonne pas de se voir réclamer un vote.
Avec cette convocation à contre-temps, il a pris le risque d’affaiblir la fonction présidentielle qui ne s’accommode pas d’indécision, d’atermoiement et de suivisme. Il a pris le risque d’affaiblir également l’Assemblée elle-même car les Français ne comprennent pas que leurs députés ne donnent pas le feu vert ou rouge à cette intervention.
Voilà pourquoi vous ne pourrez échapper, d’une manière ou d’une autre, à un vote formel de l’Assemblée Nationale. Le Président de la République s’est mis lui-même dans une nasse institutionnelle encore resserrée par le vote britannique et l’annonce du vote du Congrès américain.
Par conviction, par filiation aussi, nous cherchons à être fidèle à l’esprit et à la lettre de notre constitution. Nous avons évité à ce stade d’oser ce que vous aviez osé.
Au printemps 2008, lorsque Nicolas SARKOZY a décidé le renforcement de notre présence militaire en Afghanistan, François HOLLANDE a défendu lui-même une motion de censure le 8 avril.
Ici même, il a dit, et lui aussi l’a oublié : « dans toute démocratie digne de ce nom, de tels arbitrages auraient été précédés d’un large débat et d’un vote solennel du Parlement ».
Vous voyez que la constance du Président de la République vaut au moins la vôtre.
Le large débat, où est-il ? En une semaine, vos ministres n’ont pas trouvé le temps d’informer les commissions de la Défense et des Affaires Etrangères. Vous n’avez réuni les Présidents de Groupe et de Commission que lundi après y avoir été contraints par les événements. Des erreurs gravissimes. Votre responsabilité était de créer les conditions du consensus. Tout a été fait pour s’en éloigner.
Le 27 août, le Président de la République nous a annoncé que la France était prête à intervenir. Nous avons collectivement et immédiatement posé 2 préalables :
La publication du rapport de l’O.N.U. sur l’utilisation des armes chimiques
Une base juridique à intervenir et la légitimité d’un mandat de l’O.N.U.
Notre grille de lecture s’appuie en particulier sur les nombreuses et troublantes similitudes avec la guerre en Irak :
Comme en Irak, l’élimination d’un dictateur ne suffira pas à poser les fondations d’un régime démocratique
Comme l’Irak, la Syrie est un pays en guerre civile
Comme l’Irak, la Syrie est un pays complexe dans sa composition ethnique avec une minorité kurde importante, complexe dans sa composition religieuse, divisé entre les sunnites et une minorité chiite et alaouite dirigeante, sans oublier la situation des chrétiens d’Orient dans cette partie du monde qui ne peut nous laisser insensible.
Nous vous demandons aussi, Monsieur le Premier Ministre, de mesurer les conséquences d’une intervention sur les intérêts français au Liban et la sécurité des soldats français sous casque bleu au Liban.
Tout en Syrie, comme en Irak il y a 10 ans, converge pour que la France fasse entendre la voix de la légitimité internationale. Rien, absolument rien ne justifie un changement de pied aussi radical de notre diplomatie politique et militaire.
Evidemment, comme vous, nous avons ressenti une intense émotion en découvrant lundi soir les images insoutenables de civils, d’enfants et d’adultes suffoquant avant de mourir.
L’utilisation de gaz est un tabou absolu du droit international depuis le protocole de Genève de 1925 et plus encore depuis 1993 avec l’adoption de la convention sur l’interdiction et la destruction des armes chimiques. Mais c’est, vous le savez pertinemment, à l’ONU et à l’ONU seule de nous dire comment et par qui des gaz ont été utilisés. Dès publication de ce rapport, la France devra sans tarder prendre des initiatives diplomatiques fortes, déposer un projet de résolution devant le Conseil de Sécurité, le défendre pour entraîner l’adhésion de la communauté internationale.
C’est donc le cœur lourd au regard de la cause qui pourrait justifier une riposte que nous exprimons trois refus :
Refus d’une action strictement militaire sans buts réels de guerre au-delà d’un coup de semonce ou d’une punition
Refus surtout d’une intervention isolée sans légitimité internationale
Refus enfin d’un renoncement, voire à certains égards d’un reniement de notre politique étrangère.
Dans ce moment exceptionnellement grave, le Président de la République a une responsabilité historique, celle de faire vivre la voix singulière de la France dans le concert des Nations.
Voix singulière, forte et indépendante, la France est seule aujourd’hui, isolée comme elle ne l’a jamais été, spectatrice de ce qui se passera le 9 septembre à Washington.
Monsieur le Premier Ministre, nous avons posé 2 préalables à toute intervention de la France.
Notre position est dictée par le long cours de la politique étrangère de la France.
Le Président de la République n’a pas reçu mandat de s’affranchir du cadre des Nations Unies. Si, d’aventure il venait à prendre cette lourde responsabilité, les députés de l’UMP ne le soutiendraient pas.
mercredi 4 septembre 2013
Communiqué de presse de Marie-Louise Fort
François Hollande « s’en va-t-en guerre » …
François Hollande affirme que la France est « prête à punir ceux qui ont pris la décision infâme de gazer des innocents ».
Chacun de nous est bien sûr horrifié par le massacre d’hommes, de femmes et d’enfants par armes chimiques, le massacre des innocents…La barbarie à l’état pur…
On parle aux Etats-Unis de frappe limitée. Le Conseil de sécurité de l’ONU ne donnera pas son aval en raison des vétos russe et chinois…Il existe un risque réel de mettre le feu au Proche-Orient et tout particulièrement au Liban, ce qui pourrait avoir comme conséquence une destabilisation désastreuse pour le monde.
La France doit apporter sa propre analyse, sa propre réflexion, être prudente… Il est indispensable qu’elle ne méprise aucune prise de position particulièrement celle de la Russie. Il est souhaitable de ne pas négliger la solution politique… C’est la position que je défendrai lors de la réunion de la commission des affaires étrangères en présence du ministre Laurent Fabius.
Pour l’heure, enfilant ses habits de guerrier en chef, François Hollande « s’en va-t-en guerre » et oublie de commenter les nouveaux chiffres du chômage, 6300 chômeurs de plus et donc autant de familles impactées… à suivre
Marie-Louise Fort
Député de l’Yonne
Communiqué de presse de l’UMP
PARIS, 3 septembre 2013 (AFP) – Les députés UMP exigeront un vote du Parlement si François Hollande décide une intervention en Syrie en dehors du cadre de l’ONU, ce « qui serait une vraie rupture avec ses prédécesseurs », a annoncé mardi leur chef de file, Christian Jacob.
En revanche, un vote dès le débat de mercredi « n’aurait pas de sens » puisqu’aucune intervention n’a encore été décidée, a ajouté le député de Seine-et-Marne devant la presse à l’issue d’une réunion de son groupe.
« Le groupe UMP a adopté une position unanime: une intervention ne peut se faire qu’avec deux préalables, la publication du rapport des experts des Nations unies pour savoir comment les armes chimiques ont été utilisées, par qui et dans quelles conditions, et une base juridique solide et claire, c’est-à-dire une résolution des Nations unies », a-t-il expliqué.
« Si ces deux conditions ne sont pas réunies, on exigera un vote devant la représentation nationale, soit au titre de l’article 49 de la Constitution avec engagement de la responsabilité du gouvernement, soit au titre de l’article 50 avec débat suivi d’un vote. Si le président de la République voulait s’affranchir du cadre onusien, ce serait une rupture avec tous ses prédécesseurs, on exigerait un vote et il y aurait un vote contre de notre groupe -mais on n’en est pas là », a poursuivi M. Jacob.
Pour le chef de file des députés UMP, « un vote mercredi à l’issue du débat n’a pas de sens parce qu’il n’y a pas de frappe » et « le président de la République s’est mis dans une nasse institutionnelle et a fait un contresens de calendrier ».
M. Jacob a aussi plaidé pour que la France, « isolée comme elle ne l’a jamais été, soutenue par aucun pays européen et dépendante du vote du Congrès américain », dépose une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU après la publication du rapport des experts pour avoir un socle juridique à une intervention en Syrie.
« Où sont les initiatives diplomatiques personnelles du président de la République et les contacts avec les dirigeants étrangers? Dans une situation similaire, on n’imagine pas que Jacques Chirac n’aurait pas eu des contacts pendant l’été avec Vladimir Poutine ou avec les dirigeants chinois. Et Nicolas Sarkozy avait immédiatement créé les conditions d’une coalition », a-t-il lancé.