Questions orales sans débat du mardi 25 février 2014

 

Mme la présidente.

La parole est à Mme Marie-Louise Fort, pour exposer sa question no 564, relative aux conséquences de l’implantation d’une borne Eurodac à Sens.

Mme Marie-Louise Fort.

Monsieur le ministre, depuis 1er février 2013, une borne Eurodac est en fonction à Sens. En effet, l’agglomération dijonnaise n’arrivait plus, semble-t-il, à faire face à l’afflux de populations immigrées, issues pour la plupart d’Afrique subsaharienne. Le maire de Dijon, M. Rebsamen, et le préfet ont alors demandé l’installation de deux nouvelles bornes en Bourgogne. Ce sont les communes de Mâcon et de Sens qui ont été choisies, sans concertation locale, ce qui, vous le comprendrez bien, est ressenti comme un certain mépris pour les élus locaux.Des structures d’accueil des demandeurs d’asile ont été créées à Vergigny et Joigny.

Concrètement, cette borne Eurodac crée et créera un appel d’air à Sens. Or, avec 25 000 d’habitants, à cinquante-cinq minutes de Paris, cette ville n’a pas les moyens financiers, humains et matériels de gérer une telle situation.

Je tiens d’ailleurs à rendre hommage aux personnels qui ont permis le démantèlement d’une première filière malienne.

Les demandeurs d’asile déboutés __ 80 % d’entre eux __ sont invités à regagner leur pays d’origine, ce que, vous le savez bien, ils ne font pas tous, tant s’en faut. Que faire alors de ces familles en situation de détresse ? Le conseil général s’inquiète à juste titre.

J’ai trois questions, monsieur le ministre.

Pourquoi n’avoir pas installé cette borne Eurodac dans le chef-lieu de département de l’Yonne, sa préfecture ?

Quelles mesures envisagez-vous de prendre afin d’éviter que Sens, à cinquante minutes, je le rappelle, de la capitale, ne soit rapidement la destination privilégiée par ces sans-papiers rejetés et par Paris et par Dijon ?

Enfin, pensez-vous vraiment que disséminer ces populations est efficace en termes de contrôle de ces flux migratoires ?

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur.

C’est un sujet difficile, madame la députée Fort, que celui de la demande d’asile.

De 2009 à 2011, la Bourgogne a connu une forte progression de la demande d’asile. Celle-ci a même augmenté de 60 % en 2011. Même si l’on constate un ralentissement en 2013, la Bourgogne fait face à une situation difficile qui se retrouve au niveau national, puisque la demande d’asile a progressé de près de 70 % depuis 2007 ; je n’y reviens pas. Un rapport a été commandé à Mme Létard et à M. Touraine, et je ferai bientôt, évidemment, dans le sens d’une autre organisation et pour réduire les délais.

Vous m’interrogez sur la question des bornes Eurodac en Bourgogne. Nous avons constaté que 70 % des premières demandes d’asile en Bourgogne étaient faites dans le département de la Côte-d’Or. Cette concentration a été favorisée, d’une part, par le fonctionnement de la plate-forme, dont le champ d’intervention était limité à ce département, et, d’autre part, par la localisation dans ce département de 80 % des places d’hébergement d’urgence en 2011.

Cette concentration des demandeurs d’asile sur un seul département ne pouvait être considérée comme une situation satisfaisante. Il a donc été décidé de mener une expérimentation sur l’ensemble de la région en installant, comme vous l’avez rappelé, deux bornes supplémentaires de relevé d’empreintes digitales, l’une à Mâcon et l’autre à Sens.

Ces choix ont été faits en concertation avec les représentants locaux. Dans le même temps, la plate-forme d’accueil a créé une antenne dans chacune de ces villes, ce qui a permis de rééquilibrer la répartition de l’hébergement des demandeurs d’asile. En outre, 100 places d’hébergement en centre d’accueil des demandeurs d’asile ont été créées en juillet 2013 dans votre département, l’Yonne.

Le suivi de cette expérimentation a permis de constater un changement des nationalités présentes dans cette région. Ainsi, les populations en provenance du Kosovo et de l’Albanie, essentiellement des familles, ont rapidement supplanté les populations de la Corne de l’Afrique, principalement des célibataires, dont le nombre a été divisé par dix.

Par ailleurs, le Kosovo et l’Albanie ont enfin été inscrits sur la liste des pays d’origine sûrs : c’est un élément nouveau dont les effets sur les flux dans votre région seront observés. Les premiers éléments au niveau national démontrent d’ores et déjà une baisse de la demande d’asile de ces populations, mais il faut rester prudents.

Une réforme de l’asile sera menée : elle nécessitera des moyens, une autre organisation, mais aussi une autre répartition sur le territoire ; nous aurons l’occasion d’en parler plus tard. Aujourd’hui, la grande difficulté tient au fait que ces populations se concentrent dans les mêmes régions. Il faut donc essayer de trouver, d’imaginer des solutions nouvelles et efficaces.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Louise Fort.

Mme Marie-Louise Fort. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Comme vous l’avez bien compris, mon souci concerne à la fois les demandeurs d’asile et les étrangers qui ne sont pas reconnus comme tels. Il s’agit notamment des personnes relevant de cette dernière catégorie, puisqu’en effet, désormais, les ressortissants de ces pays ne demandent pas l’asile. Je vous demande de continuer à être vraiment particulièrement attentif à la dissémination de ces populations. Sens est une petite sous-préfecture, et nous avons déjà beaucoup de soucis.

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